30 octobre 2015

Alexandre Picard: «J'aimerais beaucoup rester à Fribourg un moment»


Il en a fait du chemin depuis son arrivée en Europe, Alexandre Picard. Après la Russie, l'Autriche et l'Allemagne, le défenseur québécois de 30 ans découvre cette saison le championnat suisse avec le HC Fribourg-Gottéron. Sobre mais précieux, il revient avec nous sur le début de saison en fanfare de son équipe et son rôle dans l'effectif des Dragons.

Photo Laurent Daspres


Alexandre Picard, le HCFG marche sur l'eau en ce début de saison. Comment l'expliquez-vous?

C’est la première fois que l'équipe dans laquelle je joue effectue un aussi bon début de saison, surtout que les attentes n’étaient pas très élevées envers l’équipe après le dernier exercice. Le noyau de l’effectif est resté et tout le monde s’est engagé à se donner à 100%. Les joueurs qui sont arrivés constituent de bonnes additions et nous sommes 23 à pousser dans la même direction. Cela explique pas mal de choses.

Comment définiriez-vous votre rôle dans l’équipe?

On m’a engagé pour solidifier la défense. Je crois qu’il s’agissait d’un problème à Fribourg l’année passée. Mon but est de bien jouer défensivement et d’avoir une bonne relance. On ne s’attend pas forcément à ce que je fasse des points, mais plutôt que j’aide l’équipe à sortir le puck de la zone, puisqu’après nous avons suffisamment de bons joueurs devant. Je joue les situations spéciales, alors qu’à 5 contre 5 je suis jumelé à Yannick Rathgeb qui est un jeune défenseur très talentueux. Je lui apporte mon expérience en lui expliquant comment gérer un match, notamment en fonction de l’évolution du score.

En 17 matches, vous n’avez pas écopé de la moindre pénalité. C’est plutôt rare pour un joueur réputé pour ses qualités défensives…

Je ne sais pas vraiment comment l’expliquer. Il y a peut-être l’expérience ou cela peut être lié au système de jeu. J’ai un rôle défensif, mais avec Yannick nous passons très peu de temps dans notre zone. Je touche du bois pour que cela continue…

Qu’est-ce qui vous a convaincu de rejoindre Fribourg-Gottéron?

L’année passée, j’avais déjà effectué un essai de deux semaines. J’avais laissé ma marque sur et hors de la glace. Lorsque Christian Dubé a été nommé directeur sportif, je crois qu’il gardait un œil sur moi en Allemagne. Il connaissait Larry Huras qui était mon entraîneur et j’avais bien joué en play-off. Ce n’était donc pas une décision difficile pour les deux. De mon côté, je ne pouvais refuser un travail en Suisse, surtout à Fribourg en tant que francophone.

Aviez-vous d’autres opportunités en Suisse ou ailleurs?

En Allemagne, Ingolstadt voulait prendre une autre direction et ce n’était pas clair si le club voulait me conserver. Mon but premier était de signer à Fribourg. S’agissant de l’Amérique du Nord, je n’ai pas songé à y retourner. Je ne voulais pas passer par la AHL.

Avez-vous déjà entamé des discussions pour prolonger votre contrat au HCFG?

C’est difficile de ne pas penser à rester. Ma famille et moi-même sommes bien ici et l’équipe a beaucoup de succès. J’aimerais beaucoup rester à Fribourg un moment. Néanmoins, je n’ai pour l’instant pas entamé de discussions pour prolonger mon contrat, ni mon agent puisque je n’en ai pas à l’heure actuelle.

Vous avez connu quatre championnats européens. Comment s’est passé votre parcours?
Au début, je n’ai disputé que 11 matches de KHL car j’ai subi une sérieuse blessure rapidement dans la saison. Je n’ai toutefois pas adoré mon expérience. Il y a les voyages qui sont difficiles et il s’agissait globalement d’une mauvaise expérience. Par la suite, à cause de ma blessure, j’ai dû signer en Autriche et je ne connaissais pas le niveau de la ligue. Je me suis un peu trompé.

Et par la suite?

L’année dernière, je voulais vraiment attendre la bonne opportunité. J’avais des offres en France, en Autriche et ailleurs, mais c’était sûrement ma dernière chance de jouer dans un très bon championnat. Je suis content d’avoir été patient, même si cela n’a pas été facile. De plus, l’année passée, j’ai connu une belle saison avec Ingolstadt qui m’a permis de retrouver le plaisir de jouer au hockey. J’étais aussi surpris en bien du niveau en Allemagne, ainsi que de la qualité des patinoires et du public.

J’ai toujours voulu découvrir l’Europe

Durant l’été 2012, vous avez pris la décision de rejoindre l’Europe, plus particulièrement la KHL. Cette décision a-t-elle été difficile à prendre?

Non, le choix était assez facile à faire. Cela faisait quatre saisons que je jouais en NHL, notamment à Montréal qui était mon club d’enfance. Par la suite, j’ai signé à Pittsburgh en sachant que je ferai l’ascenseur entre la AHL et la NHL. Arrivé à un certain point, il n’y a plus de plaisir à cela et tu penses davantage à la stabilité et au côté familial. Je n’avais que des offres à deux volets. Je comprends les joueurs qui se raccrochent au rêve de la NHL, mais j’ai toujours voulu découvrir l’Europe.

Vous avez disputé plus de 250 matches de NHL avec diverses équipes. Que retenez-vous de ces différents exercices?

La saison à Montréal reste un super souvenir, surtout pour un Québécois comme moi. Parfois, lorsque j’y repense, j’ai encore de la peine à y croire. Il s’agissait d’un autre monde car les joueurs avaient tout le temps les projecteurs sur eux et les gens nous reconnaissaient dans la rue. La saison s’est bien passée, mais le seul regret est que je me suis cassé la jambe à l’entraînement deux semaines avant les séries éliminatoires.

Vous avez fait l’objet de plusieurs échanges dans votre carrière. Comment vit-on un tel moment ?
En Amérique du Nord, c’est un procédé normal. Tous les échanges ont été faits de sorte à me redonner une chance dans le futur. Je n’en regrette donc aucun. Je ne l’ai toutefois pas vécu avec une famille, mais j’imagine que c’est bien plus difficile dans cette situation.

En 2005, vous avez remporté la Coupe Calder avec Haalifax. Cela reste-t-il l’un de vos plus beaux souvenirs?

Il s’agissait de ma dernière année junior et il y avait le lock-out en NHL. Nous venions de perdre la finale avec Haalifax contre l’équipe de Sidney Crosby et de Marc-Antoine Pouliot quand les Phantoms m’ont appelé trois jours plus tard. J’ai pu jouer deux rencontres en finale et je ne m’y attendais pas du tout. Comme il n’y avait pas de NHL, nous avons joué dans la patinoire de Flyers devant beaucoup de monde. Le niveau était aussi très bon. D’ailleurs, il me semble que trois quarts de l’alignement des Phantoms évolue désormais en NHL.

Quel coéquipier a le plus influencé votre jeu?

Peu de monde le connaît, mais il s’agit de John Slaney qui a joué en AHL puis en NHL. C’est lui qui a marqué le fameux but de l’équipe du Canada junior contre les Russes. C’est une légende au Canada, mais il est moins connu ailleurs. Lorsque je suis arrivé à 20 ans, il avait 35 ans. Je ne faisais que regarder sa manière d’évoluer sur et en dehors de la glace. Il m’a beaucoup appris.

Le profil d’un défenseur défensif ne met pas vraiment un joueur en avant. Comment vit-on un tel rôle?

J’ai eu ce rôle toute ma vie. J’aime beaucoup dire que lorsque les 60 minutes d’un match sont passées et que les supporters te disent qu’ils ne t’ont pas remarqué, cela signifie que tu as été bon. Toutefois, avec le hockey actuel, il faut de toute manière une touche offensive à n’importe quel défenseur, notamment pour relancer correctement le jeu.

Gabriele Beffa