14 octobre 2014

René Matte: «En hockey, un coach, c’est le père: il peut gueuler s’il le veut»


«Je sais comment Hans se sent car je l’ai moi-même vécu il y a douze ans au Canada» commente René Matte. © Charles Ellena



Il était 17h30 dimanche lorsque René Matte a appris la nouvelle. Le matin-même, comme il le fait chaque week-end, l’assistant qu’il était encore avait pris soin d’envoyer un petit rapport à Hans Kossmann - «qui est blessé, qui est malade….», précise le Québécois - sans se douter que ce serait lui qui aurait le sifflet à la bouche, le lendemain à l’entraînement.


Interview

- René Matte, on imagine que le licenciement de Hans Kossmann ne vous laisse pas indifférent…

Ce n’est pas le fun à vivre. Je sais comment Hans se sent car je l’ai moi-même vécu il y a douze ans au Canada. Quand il est entré en fonction à Fribourg, je ne le connaissais pas vraiment. Mais en trois ans, tu crées des liens. Forcément. On travaillait ensemble, mais on se voyait aussi en dehors de la glace. Quand Sylvain Rodrigue (l’entraîneur des gardiens, n.d.l.r.) était ici, on se faisait toujours un petit souper. Il venait parfois chez moi pour préparer les entraînements et il était toujours super avec ma petite (fille).

- Avez-vous été surpris?

Ecoutez, ça arrive, c’est le métier qui veut ça. Mais, excusez-moi l’expression, j’ai le cul entre deux chaises et vous comprendrez que je ne peux pas en dire beaucoup plus. Oui, on n’allait pas bien, mais la saison est encore longue. Si, ces trois dernières années, on termine 3e, 1er et 2e, si on dispute une finale et deux demi-finales, c’est aussi un peu grâce à lui, non?

- Le lien de confiance entre Hans Kossmann et les joueurs était-il rompu?

Je ne crois pas que quelque chose se soit cassé. En Ligue des champions, notre défense a toujours été solide, à part peut-être le premier match contre Djurgarden, où on menait 3-1 avant de se mettre les pieds dans la même bottine (défaite 5-4 après prolongation, ndlr). Le problème, c’est que la Ligue suisse est beaucoup plus intense: ici on te saute tout de suite à la gorge. Les matches de Ligue des champions, eux, s’apparentent davantage à des combats de boxe: il y a toujours deux rounds d’observation avant que quelqu’un ne se décide à attaquer. Le fait est qu’on n’a pas réussi à s’adapter aux différents styles.

- Les joueurs jouaient-ils contre lui?

Je ne pense pas que l’on puisse faire exprès de manquer le filet ou de perdre une mise en jeu. Quand je vois la manière dont on s’est battu pour revenir par trois fois au score face à Ambri, j’ai de la peine à me l’imaginer.

- L’idée de faire le pas et de reprendre l’équipe en tant qu’entraîneur en chef vous a-t-elle traversé l’esprit?

Non. On me l’avait demandé après le départ de Serge Pelletier, et cette expérience n’avait pas été couronnée de succès (7 matches, 7 défaites en février 2011, n.d.l.r.). Un numéro 2 ne peut pas devenir numéro 1 dans la même équipe. J’en étais déjà conscient à l’époque.

En hockey, un coach, c’est le père: il peut gueuler s’il le veut. L’assistant, lui, c’est la mère: il passe derrière pour recoller les pots cassés. Vous imaginez si je commence à élever la voix à l’entraînement? Les joueurs me diraient: mais il se prend pour qui celui-là? Si je décide un jour de devenir entraîneur-chef, je partirai de Fribourg.

Pierre Salinas