"Sous un maillot qui se porte avec fierté, si tu le portes; il faudra le mouiller !" Fan's Club Fribourg Gottéron

28 novembre 2012

L’image qui choque


Lukas Gerber couché sur la glace et tous les Genevois regardant ailleurs. McFred
Lukas Gerber est K.-O. Attirés par une bagarre, les Genevois regardent dans une autre direction sans se préoccuper du malheureux.


L’image de Lukas Gerber, inanimé sur la glace après une charge violente de Samuel Friedli, a choqué toute l’enceinte de la BCF-Arena assistant au match entre Gottéron et Genève samedi dernier. Lundi matin à l’heure du café, la photo tirée par McFreddy et publiée dans ces colonnes a même interpellé des lecteurs qui ne s’intéressent pas forcément au sport. Un homme, un hockeyeur exerçant le même métier qu’eux est au sol et les Servettiens regardent tous dans une autre direction. Une attitude que certains n’hésitent pas à assimiler à un manque de respect. Tentative de décryptage.

«En découvrant cette image, j’ai dit: «wouaw», souligne Alain Wicht. Le photographe de «La Liberté» ajoute: «J’ai ressenti une chose: l’être humain passe après un enjeu tout relatif.»

Les yeux sur la bagarre

L’arrêt sur image, d’une fraction de seconde, permet aussi de deviner l’arbitre avec le sifflet à la bouche, occupé à interrompre le jeu. «Peut-être que les joueurs genevois regardent ailleurs parce que leur esprit est attiré par autre chose», analyse Romain Ducret, psychologue du sport spécia-lisé dans le coaching mental des professionnels.

Sans mandat officiel de clubs, le Fribourgeois s’occupe de Dragons mais aussi, notamment, d’Aigles. A chaque fois à titre privé. «Je laisse mes origines de côté. Je n’ai pas de parti pris», assure-t-il. «Dans le cadre de ma profession, je me dois de rester objectif. Et il n’est pas objectif d’affirmer que les Genevois n’ont aucune considération pour l’adversaire au sol. On ne peut pas toujours tout expliquer. Leur attitude peut aussi démontrer une certaine honte. On fuit le phénomène du regard… Cela peut être tant de choses.»

En l’occurrence, tout le monde suit du regard une bagarre venant d’éclater vers le banc fribourgeois, en prolongement de l’action de l’agression sur Gerber. Personne ne se préoccupe du sort du blessé. Un peu comme le boxeur qui vient de battre son adversaire d’une fulgurante droite et qui ne s’en préoccupe plus. «Sur un ring, le K.-O. fait partie du jeu. On ne peut pas comparer», réagit Romain Ducret.

Lukas Gerber sans réaction, puis évacué sur une civière: la scène a jeté un froid dans les travées de la patinoire fribourgeoise. Le contraire aurait interpellé Romain Ducret. «J’ose espérer qu’il reste, chez les gens, un minimum d’empathie! Je constate qu’une blessure – je ne parle pas de la fracture d’un doigt ou d’un autre cas courant – marque toujours les esprits. Une perte de connaissance et le sang qui coule, ça rend triste. Et cela crée automatiquement un climat de choc. Fort heureusement. Si l’ensemble des gens s’en «foutaient», ce serait inquiétant. Il serait dangereux d’ignorer ce genre de scène. On sait que le sport est émotionnel. Il faut tout faire, dans les clubs, pour garder une certaine humanité. Une blessure peut être plus grave en hockey qu’en football. On peut détruire la vie à plus ou moins long terme. Les conséquences de certains gestes peuvent être tragiques.»