A l’image de Tristan Scherwey, ils sont Fribourgeois et portent le maillot de Berne, Zoug ou Davos. Fribourg- Gottéron voit une part significative de sa relève partir sous d’autres horizons, un handicap sérieux pour le mouvement juniors du club de Saint-Léonard. Analyse d’un phénomène inquiétant.
Romain Loeffel est une exception. Le défenseur neuchâtelois qui s’apprête à disputer les mondiaux des moins de 20 ans est le seul Dragon dans les sélections nationales juniors M20, M18 ou M16. Et pourtant, il existe des Fribourgeois dans ces équipes (Scherwey, Bertschy). Mais ils n’«appartiennent » plus à Gottéron ou Guin. Ils ont choisi de s’exiler pour poursuivre leur formation. La plus importante colonie fribourgeoise se trouve dans le mouvement juniors du CP Berne: Tristan Scherwey (1991), Arnaud Montandon (91), Jimmy Oudelet (92), Marco Baeriswyl (92), Christoph Bertschy (94, considéré comme l’un des meilleurs attaquants suisses de sa génération), Dario Rüfenacht (94), Jeremy Sturny (94) et Julien Privet (96). Valentin Cattilaz (91) et Yves Gross (95) sont à Zoug, alors que Benoît Jecker (94) a choisi Davos. «Mal au coeur» «C’est de la folie», constate Pascal Schaller, Fribourgeois en charge des novices élites de… «Bern Future». Particulièrement préoccupé par la situation actuelle, l’ancien attaquant déplore: «Cela me fait mal au coeur de voir tout ce qui arrive à Berne en provenance de Fribourg.» Le refrain est identique du côté de Ruedi Raemy, qui fait un travail fantastique avec les plus petits Dragons, des bambinis aux moskitos: «Cela me touche de voir toujours partir les jeunes. Il y a un problème quelque part. Il faut le trouver. Je suis tout en bas de la pyramide. Il m’est difficile de savoir ce qui se passe.» Tristan Scherwey a ouvert une brèche en 2007, passant à Berne pour «voir quelque chose de mieux». «Il est parti et il a connu le succès», reconnaît froidement Daniel Bürgi, chef de formation du mouvement juniors de Gottéron. La relégation des novices élites fribourgeois en catégorie top, au printemps 2009, a provoqué de nouveaux départs. «C’était ceux nés en 1994. Ils étaient pour la plupart dans les cadres nationaux des moins de 16 ans. Ils voulaient rester au plus haut niveau et mener de front leurs études. Berne est le club le plus proche», explique Pascal Schaller, tout en soulignant: «Comme à Zurich, Kloten ou Davos, Berne offre des conditions idéales. Les jeunes s’entraînent sept fois par semaine et sont dans une école spéciale. A Davos, Jecker fréquente également un collège privé. C’est vraiment pro.» La recherche de la perfection. Voilà le point commun de ces destinations attirantes pour les jeunes en quête de gloire. «Un club formateur doit espérer intégrer un à deux éléments toutes les deux saisons en première équipe. Berne a encore de plus grandes ambitions: qu’un de ses joueurs parte pour la NHL tous les dix ans… Le suivi, l’assistance et toute la planification prennent beaucoup d’énergie. Mais il n’y a pas de miracle. Il faut beaucoup travailler pour qu’un ou deux jeunes percent. Il y a un truc à revoir dans le canton de Fribourg: le système sport-études.» «Société d’égoïstes» Daniel Bürgi relève: «A Fribourg, il faut trouver une solution pour garder les jeunes! Les persuader du succès de Gottéron, qui ne surviendra qu’en se serrant les coudes. Mais c’est difficile de faire passer ce message dans la société actuelle qui regorge d’égoïstes. L’autre difficulté, c’est que nous n’avons pas d’école privée permettant d’avoir une vraie filière sport-études. Benoît Jecker m’a dit que c’est vraiment top, ce qu’il vit à Davos. Ici, il n’y a pas la possibilité d’avoir une infrastructure similaire. Le canton vient de réagir en ne payant plus les frais de scolarité pour les Fribourgeois exilés dans d’autres cantons pour étudier. Cela peut nous aider. Et avec le projet «Sport et formation» on essaie de faire quelque chose à Fribourg.»