Pour les trois prochaines saisons, Gottéron pourra compter sur l’international Philippe Furrer, qui a signé hier
Hockey sur glace » Avec Reto Berra et Roman Cervenka, c’est sans aucun doute le plus beau coup réalisé par Christian Dubé, en charge de la direction sportive de Fribourg-Gottéron depuis 2015. Le Québécois a convaincu Philippe Furrer, 32 ans, de rejoindre les bords de la Sarine l’été prochain.
Le défenseur formé à Berne, pilier de Lugano depuis deux ans, s’est engagé hier pour trois saisons en faveur des Dragons qui courraient après un profil tel que le sien depuis des années. Soit celui d’un vrai international suisse – le terme est souvent galvaudé – comme ses 90 sélections, les six championnats du monde et les Jeux olympiques de Vancouver auxquels il a participé l’attestent. «Je suis super content, jubile Christian Dubé. C’est évidemment un gros plus pour notre défense. Avec Holos, Rathgeb et Furrer sous contrat la saison prochaine, notre arrière-garde n’aura rien à envier à celles de la concurrence.»
L’atout géographique
Pour mettre la main sur le vice-champion du monde 2013, Christian Dubé a dû sortir son chéquier – «il va bien gagner, c’est normal, mais moins qu’à Lugano», souffle ce dernier – et mater la concurrence de Bienne, Genève, Langnau. «Des cadors du championnat sont aussi rentrés dans la danse sur la fin, ce qui a rendu l’opération compliquée», raconte le Québécois qui a joué plus de dix ans aux côtés de sa nouvelle recrue.
Un atout au moment des négociations. Mais si le pur produit du CP Berne, qui de son propre aveu «n’aurait jamais imaginé jouer pour Fribourg-Gottéron», a opté pour les bords de la Sarine, c’est en partie parce qu’il vient de construire une villa à Morat avec son épouse, elle-même originaire de Bösingen. «Elle a toujours été orientée vers la Suisse alémanique, et supporte plutôt le CP Berne, rigole Philippe Furrer. Plus sérieusement, c’était évidemment un facteur décisif. Je voulais éviter de faire trop de kilomètres entre mon domicile et la patinoire. A 32 ans, avec les enfants qui arrivent en âge d’être scolarisés, le timing semblait idéal.»
Un homme de vestiaire
Mais, jure l’homme aux 625 matches dans l’élite (199 points, dont 42 buts), l’ambition a aussi guidé son choix: «Dans ma carrière, j’ai toujours évolué pour des formations dont le titre se trouvait au centre des préoccupations. Si j’ai choisi Fribourg, c’est d’abord parce que j’ai senti, plus qu’à Bienne, que le club pouvait viser le titre.»
Fort d’un joli gabarit (1 m 86, 92 kg), Philippe Furrer, est un joueur «polyvalent, bon dans tous les domaines», résume le directeur sportif, pas effrayé par la relative fragilité de celui qui n’a pas été épargné par les blessures jusqu’ici. «Philippe prend soin de lui et a encore de belles années devant lui», assure Dubé.
Avec le Luganais, Gottéron sait à quoi s’attendre: de l’impact physique, de la sobriété ainsi qu’une petite vingtaine de points par saison. S’il n’est pas à proprement parler un défenseur offensif, il donnera davantage de solutions à Mark French à la ligne bleue, un secteur dans lequel Gottéron manque de talent. «On attendra surtout de moi que je stabilise un peu plus l’arrière-garde et que j’apporte du caractère», avance le futur Fribourgeois, un vrai meneur d’hommes, confirme Caryl Neuenschwander, son ancien coéquipier à Berne: «Il a la carrure du leader par excellence. Les jeunes pourront prendre exemple sur lui.» Et l’ancien Luganais Lorenz Kienzle d’ajouter: «Quand il est arrivé au Tessin (en 2015, ndlr), dans le vestiaire, c’était un peu «Ramba Samba». Philippe a amené de la tranquillité.»
Avec sa nouvelle pièce maîtresse défensive, triple championne suisse, Christian Dubé possède en ses rangs un gagneur, qui porte à sept le nombre de défenseurs déjà sous contrat pour le prochain exercice. Ainsi, le Québécois devra choisir qui de Lorenz Kienzle, Benjamin Chavaillaz ou Andrea Glauser, trois éléments efficaces cet automne, ne sera pas prolongé. Un problème de riche, auquel Gottéron n’avait plus l’habitude d’être confronté.
Un signal fort pour un nouveau cycle
«En attirant Reto Berra, Gottéron a montré qu’il avait les moyens de viser le titre de champion.» Personnage intelligent, Philippe Furrer est aussi un fin communicateur, qui sait pertinemment qu’à Fribourg, ses chances de devenir champion seront plus limitées qu’à Berne ou Lugano.
Cela dit, son arrivée, couplée à celle du gardien reparti tenter sa chance en Amérique du Nord, qu’il cite en exemple, permet à Fribourg d’espérer un nouveau cycle. Car la signature de l’international suisse n’est pas sans rappeler, toutes proportions gardées, celle de Sandy Jeannin en 2008. L’arrivée du Neuchâtelois, de par son aura, avait alors agi en point de départ du renouveau fribourgeois, faisant de Saint-Léonard, durant cinq ans au moins, une adresse attractive, sinon respectable. Une période révolue, la faute à deux passages en play-out et quelques épisodes mettant à mal l’image du club.
Les disparités entre le haut et le bas de la hiérarchie étant plus creusées qu’il y a 10 ans, peut-on s’attendre à vivre un engrenage du même type? Non. Car Christian Dubé, qui dispose d’enveloppes restreintes depuis sa prise de fonction, n’a pas les moyens de ses prédécesseurs, encore moins ceux de Zurich, Berne ou Lugano. Comme son classement actuel l’indique, le Dragon appartient à la terre du milieu, à mi-chemin entre les grosses et les petites écuries. Or, en montrant qu’il pouvait arracher un international, même vieillissant, à Bienne ou Genève, Gottéron envoie un signal fort à ses plus proches concurrents.
Berra a attiré Furrer, lequel attirera peut-être… un centre suisse de premier plan: la nouvelle priorité d’un Christian Dubé, qui après plusieurs échecs, s’affirme enfin dans son nouveau costume.
Pierre Schouwey