Légende de Fribourg-Gottéron, Slava Bykov le reconnaît volontiers: «Le hockey a pris une grande partie de ma vie.» Professionnellement en retrait depuis quelques années, l'ancien attaquant à l'extraordinaire palmarès n'a toutefois pas coupé avec son sport de cœur.
L'ancien numéro 90 des Dragons, quintuple champion du monde avec la Russie, va ainsi assister au derby entre Fribourg et Lausanne, ce vendredi soir (coup d'envoi à 19h45), à la BCF Arena. Le père d'Andrei, 64 ans, a accepté de se livrer au matin.ch avant cette rencontre entre ses deux anciens clubs.
Slava Bykov, que vous évoque l'affiche Fribourg - Lausanne?
Ce derby a pris de l'ampleur au cours des dernières années. Le public de chaque camp attend une victoire, ce qui rend ces matches particulièrement émotionnels. L'équipe qui sera capable de mieux gérer ses émotions et de garder la tête froide aura le plus de chance de l'emporter. Même s'il y a une certaine distance au niveau du classement, le résultat reste imprévisible.
Depuis la retraite de votre fils Andrei en avril dernier, les parties de Gottéron ont-elles toujours la même saveur?
Je n'ai pas encore digéré cette histoire, et c'est vraiment dommage. Mais je suis très content qu'Andrei ait préparé sa retraite, notamment en faisant des études. Je pense qu'il aura du plaisir, certes différent, de pouvoir transmettre et enseigner aux jeunes joueurs son savoir-faire (ndlr: Andrei Bykov a intégré le staff technique des moins de 17 ans de Gottéron). C'est un autre chapitre dans son histoire, qui est aussi chouette, je trouve. C'est formidable qu'Andrei ait pris cette décision de travailler, ou plutôt s'amuser devrais-je dire, avec des jeunes.
Vous avez eu une grande carrière d'entraîneur après avoir raccroché vos patins. Avez-vous donné quelques conseils à votre fils pour sa nouvelle aventure?
Pour ce métier, il faut aimer les enfants - si on travaille avec des juniors - ou tout simplement aimer les gens car il y a beaucoup de contacts humains. Ça demande également énormément d'énergie et beaucoup de patience. Même si on donne tel ou tel conseil, une clé pour telle ou telle combinaison, tout n'est pas toujours acquis. Mais Andrei est prêt à faire ce passage. Il est papa de deux petites filles, donc il sait déjà comment il faut dialoguer avec les enfants (sourire).
De votre côté, vous avez stoppé votre activité de consultant à Gottéron en 2021. Quelle est désormais votre relation au hockey sur glace?
Notre famille continue de fournir ce sport grâce à la dernière génération (rires). J'ai, en effet, un petit-fils qui fait ses gammes à l'école de hockey de Gottéron. Je n'en ai donc pas terminé avec le hockey. Je viens de temps en temps aux entraînements. Je discute et partage des moments avec les entraîneurs du mouvement juniors. Je côtoie aussi les autres parents. Ça m'arrive de devoir les calmer, ou alors de leur donner des conseils. C'est normal qu'ils voient leur enfant comme un champion. Mais, parfois, il faut réussir à enlever cette pression inutile sur les enfants. Ceux-ci doivent simplement s'amuser, faire leur chemin et prendre du plaisir.
Vous avez récemment confié au média SportsDaily «ne pas pouvoir vous engager pour le moment» en KHL. Pourquoi et avez-vous toujours l'envie d'entraîner?
La passion et l'envie, je les ai: il n'y a aucun souci par rapport à ça. Mais j'ai d'autres obligations dans ma vie. J'ai pleinement profité d'être joueur puis entraineur, de côtoyer les meilleurs joueurs au monde et de participer à différentes compétitions sportives. J'étais souvent loin de la maison. À l'heure actuelle, je préfère consacrer mon temps à ma famille, mes enfants et mes petits-enfants. Et, comme je l'ai dit, je vais quand même de temps en temps à la patinoire avec les petits. Pour moi, il n'y a pas d'importance tant que je peux transmettre mon expérience. Peut-être que les jeunes en ont d'ailleurs plus besoin que les grands ou les professionnels.
Vous l'avez dit, le nom Bykov continue de se pérenniser à Gottéron. Mais il a aussi une attache avec Lausanne, puisque vous y avez fini votre carrière...
C'est vrai. Je suis d'origine fribourgeoise, mais je n'oublie pas que Lausanne m'a accueilli (ndlr: en 1998) avec beaucoup de chaleur humaine. J'ai beaucoup apprécié mon passage dans le canton Vaud, à Lausanne. Cette partie de ma vie a été riche et extraordinaire sur le plan humain. Les deux villes sont différentes, mais le public est tellement fidèle et attaché à son club. Comme à Saint-Léonard. Alors, à chaque présence sur la glace, tu veux lui faire plaisir et décrocher le résultat nécessaire.
Vingt-six ans plus tard, que retenez-vous de ce transfert, qui avait dû être un tremblement de terre au sein du hockey sur glace suisse?
Un tremblement de terre, je ne pense pas (sourire). À cette époque, les dirigeants de Gottéron pensaient que ma carrière touchait à sa fin et qu'il fallait renforcer l'équipe avec d'autres joueurs. Ils avaient donc pris la décision d'arrêter notre collaboration. De mon côté, je n'étais pas prêt à mettre fin à ma carrière. Au fond de mon âme, je savais que j'avais encore quelque chose à donner. Surtout, je voulais arrêter par moi-même et pas que quelqu'un d'autre prenne cette décision à ma place. En apprenant dans la presse que j'avais été libéré par Gottéron, l'entreprise Adecco, avec laquelle je collaborais, m'avait proposé de rejoindre le LHC, qu'elle sponsorisait, tout en préparant ma reconversion chez elle. Cette possibilité était fantastique.
Ce passage de deux ans à Lausanne représentait-il la manière idéale pour conclure votre carrière?
Oui, certainement. J'étais très heureux de pouvoir jouer et finir ma carrière à Lausanne. J'avais été très bien accueilli par l'équipe, les dirigeants et le public. J'avais aussi créé de nouvelles amitiés sportives. Qu'aurais-je pu espérer de mieux?
Chris Geiger